NOTES
1 Cf. Hérodote : L'Enquête, III, de (68) à
(83)
2 Anaximandre postule comme principe fondamental de l'origine
de tout l' apeiron, l'indeterminé, l'illimité.
Principe (arkhé) qui est le fond commun de toute réalité
et qui rend possible un univers organisé sur l'équilibre
des forces et la réciprocité des positions.
3 Croire que ce sont les lois qui instituent le régime,
cela fait partie de la pensée traditionnelle. Je dirai,
en paraphrasant Léo Strauss, que en réalité
le législateur est l'ensemble de ceux qui commandent (des
groupes ou "classes" qui détiennent le pouvoir)
et la situation dans laquelle ils légifèrent dépend
de la totalité de l'ordre social, de la politeia, du régime.
"La cause des lois est le régime." Leo Strauss
: Qu'est-ce que la philosophie politique? PUF, Paris, 1992. p.38
4 Castoriadis, Cornelius : Pouvoir, politique, autonomie. In
Le Monde morcelé. Seuil, Paris, 1990. p.130
5 Untersteiner, Mario : Les Sophistes. Vrin, Paris, 1993. Tome
2, p.181
6 Cf. le chapitre XVII intitulé Sophistique et réalisme
politique, du livre cité d'Untersteiner.
7 Cf. Castoriadis, Cornelius : op.cit., pp. 130-131
8 Untersteiner, M. : op. cit. ,Tome I, p. 32
9 Ibid. , Tome 2, p. 236
10 Müller, Reimar : Sophistique et démocratie. In
: Positions de la sophistique. Colloque de Cerisy ; Vrin, Paris,
1986. p. 179
11 Untersteiner, M. : op. cit., Tome 2, p. 69
12 La République, I, 338
13 In Untersteiner, op. cit., Tome 2, p.185
14 La République, I, 348
15 Le même exemple dans un autre texte : "Dans l'un
de ses entretiens avec Périclès, Alcibiade expose
clairement les apories affectant le nomos : ayant demandé
à Périclès de définir le concept
de loi et ayant obtenu pour réponse que le nomos est ce
que le peuple réuni en Assemblée décrète,
Alcibiade s'emploie à lui démontrer que dès
lors qu'une loi est établie, qu'elle l'ait été
par un tyran, une oligarchie, ou même par le peuple il
y a, et ce dans tous les cas, contrainte sans persuasion au préjudice
de certains, sans qu'il importe de savoir si cela concerne nombre
ou peu d'individus. La loi se ramène donc à la
violence." (Untersteiner, Tome 2, p.181)
16 Finley, Moses I, : L'invention de la politique, Flammarion,
Paris, 1985, p. 179
17 "Le principe fondamental sur lequel repose la constitution
démocratique est la liberté (c'est là une
assertion courante, impliquant que c'est sous cette seule constitution
que les hommes ont la liberté en partage, ce qui est,
dit-on, le but visé par toute démocratie.)"
écrit Aristote qui n'admettait pas la conception démocratique
de la liberté. Politique, VI, 2, 1317b
18 Finley, M. I. : op. cit. , p.198
19 Politique, III, 14, 1284b,35
20 Ibid., III, 14, 1285 a, 25
21 Politique, VI, 2, 1317 b, 15
22 Hérodote : L'Enquête, III, de (84) à (88)
23 "Toute l'histoire léxicale et conceptuelle de
la pensée politique est encore à découvrir."
Benveniste, Emile : Problèmes de linguistique générale.
2. Tel, Gallimard, Paris, 1974, p.280
24 Rorty, Richard : L'homme spéculaire. Seuil, Paris,
1990, p.9
25 Benveniste, Emile : Le vocabulaire des institutions indo-européennes.
2. Ed. de Minuit, Paris, 1969. Chap. 7, pp. 71 à 83.
26 Loraux, Nicole : Eloge de l'anachronisme en histoire. In :
Le Genre Humain, Seuil, Paris, 1993. N° 27 p.23
27 De même qu'avec notre mot peuple, le demos désigne
la totalité du corps politique, comme dans la formule
"le demos décida", ou seulement une partie :
les pauvres, la canaille, le "bas peuple". Cf. Finley,
M : op.cit. p. 22
28 Loraux, N. : Notes sur l'un, le deux et le multiple. In L'esprit
des lois sauvages. Seuil, Paris, 1987, p. 162
29 "Aussi bien, qui voudrait chercher une théorie
même du régime ne trouverait pas grande chose, sinon
chez des adversaires." L.Gernet, cité par Loraux,
L'invention d'Athènes. Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Sociales, Paris, 1981. p.416, note 37
30 Loraux, N. : Op. cit., p.180
31 Aristote : Politique III, 1277 b, 7-15
32 L'étymologie de pouvoir et domination est prise de
: Dictionnaire étymologique du français. Le Robert,
Paris, 1983.
33 La neutralité du terme pouvoir est l'un des aspects
qui seraient discutables , de mon point de vue, dans l'excellent
travail de A.Bertolo : Potere, autorità, dominio : una
proposta di definizione. Volontà, anno XXXVII, N°
2, 1983. Ed. française in Le pouvoir et sa négation
, I.R.L./A.C.L. Lyon, 1984
34 Je laisse de côté les contenus sémantiques
d'autorité (d'auctoritas "être auctor".
Auctor "faire grandir". Racine I.E. aweg- "grandir")
qui interprétée dans le domaine politique montre
la capacité d'absorption de pouvoir.
35 Benveniste, E. : Problèmes de linguistique générale.
2. Tel, Gallimard, Paris, 1974. p.178 et suiv.
36 Bertolo, A. : op.cit.
37 Hieros "sacré" donne hier-arkhia et hiero-kratia,
parmi d'autres.
38 L'Antiquité différencie nettement dominum (droit
de propriété) d'impérium (pouvoir de donner
des ordres, de commander en maître). Imperium vient d'une
autre racine I.E. :per, "procurer" ou produire. Parère,
partus "procurer un enfant au mari" ; pauper qui produit
peu, pauvre; imperare "forcer à produire". Le
pouvoir politique à Rome, durant le premier siècle
après J.C., atténua progressivement les différences
entre l'empire en tant qu'ordre politique de supériorité
et la propriété sur le pays et les gens. Empire
et domination deviennent presque des synonymes dans un ordre
juridique de propriété de l'Empereur sur ses sujets.
A partir du Haut Moyen-Age, avec l'influence fondamentale du
christianisme, toute participation d'en bas, du peuple disparaît
et le pouvoir descend d'en haut. (Dieu "pantokrator, le
Pape "monarque", et le Pseudo-Denis invente la hiérarchie
qui embrasse les cieux et la terre).
39 Intentionnalité, pour le dire simplement, recouvre
les relations de signification, ou de sens, propres à
la communication humaine. Schématiquement le terme signifie
que le sujet a une représentation de la finalité
de son action (physique ou mentale) et que cette représentation
est, a son tour, le motif de son action. Par ex. je peux dire
(ou penser) : "En arrivant chez moi, j'espère pouvoir
prendre un verre d'eau, j'ai soif car je n'ai rien bu de la journée".
Mais le langage m'autorise aussi à dire : "Le gazon
de mon jardin attend la pluie, il est assoiffé car il
n'a pas été arrosé de la journée".
La première phrase exprime une intentionnalité
intrinsèque, la deuxième est métaphorique
ou figurée, comme si il y avait une intentionnalité
dans le gazon. (J.R.Searle)
40 Humilier vient du latin éclésiastique et le
sens à l'origine se réfère à une
attitude posturale : "baisser la tête ou courber l'échine"
en signe d'humilité.
41 Dans le mythe protagorien raconté par Platon, les disposition
naturelle de l'homme ne sont pas suffisantes pour la conservation
de l'espèce et pour éviter la disparition du genre
humain il est nécessaire "la sagesse politique"
. Ainsi, les hommes , naturellement différents entre eux,
sont amenés au même niveau politique ou normatif,
grâce à la distribution uniforme ou commune, des
normes d'aidôs et dikê.
42 La pensée politique chrétienne a aussi pensé
un monde sans domination , mais elle l'a exclue du présent
le renvoyant aux origines de l'Age d'or ou à la fin des
temps dans le Royaume des cieux. Vouloir le présentifier
ce fut la fonction de multiples hérésies. (J'exclus
de ce travail les conceptions anarchistes millénaristes
et me réfère seulement à l'anarchisme post-Lumières,
ou post-Aufklärung.)
43 Cité par Untersteiner, M. : op.cit., Tome 1, p.56.
44 Cf. Raison d'Etat, maximes d'Etat et coups d'Etat chez Gabriel
Naudé. In Zarka, Yves Charles (sous la direction de )
: Raison et déraison d'Etat .PUF, Paris, 1994.
45 Schmitt, Carl : Théologie politique. Gallimard, Paris,
1988. Chap. I(La première partie de ce livre a été
publiée à Berlin en 1922).
46 Höffe, Otfried : La Justice Politique. PUF, Paris, 1991.
47 Ibid., p. 159
48 Cf. mon article Le pouvoir et sa reproduction. In Le Pouvoir
et sa négation. Atelier de Création Libertaire,
Lyon, 1984.
49 Cf. Castoriadis, Cornelius : L'institution imaginaire de la
société. Seuil, Paris, 1975. Je cite quelques paragraphes
: "... dans le passage du naturel au social il y a émergence
d'un autre niveau et d'un autre mode d'être, et rien n'est
comme social-historique s'il n'est pas signification, pris par
et référé à un monde de significations
institué." (p.474) "On verra, à propos
des significations imaginaires premières ou centrales,
qu'il est parfaitement possible qu'une signification n'ait pas
essentiellement de 'référent' vraiment différenciable,
à un égard quelconque, de la signification elle
même." (p.464). "La rupture radicale, l'altération
que représente l'émergence du social-historique
dans la nature pré-sociale est la position de la signification
et d'un monde de significations. La société fait
être un monde de significations et est elle même
par référence à un tel monde."(p.481).
50 Système symbolique veut dire ici la même chose
que réalité sociale intégrée dans
un système de sens ou de signification, comparable à
système signitif et à système intentionnel.
Culture au sens anthropologique serait un terme proche. Système
symbolique de légitimation est la figure conceptuelle
des représentations imaginaires centrales qui organisent
le champ sémantique de la domination.
51 Cf. Colombo, Eduardo : L'Etat comme paradigme du pouvoir.
In, L'Etat et l'anarchie. Atelier de création libertaire,
Lyon, 1985.
52 La définition hobbesienne de Léviathan est réelle
au sens où elle est génératrice ou créatrice
de l'Etat. L'Etat est une construction qui explique et justifie
ce fait social historique : le pouvoir politique. Cf. ibid. pp.
36-37.
53 Cf. Proudhon, Pierre-Joseph : De la Justice dans la Révolution
et dans l'Eglise. Garnier, Paris, 1858. Je cite : "Dans
l'ordre naturel le pouvoir naît de la société,
il est la résultante de toutes les forces particulières
groupées par le travail, la défense et la Justice.
D'après la conception empirique suggérée
par l'aliénation du pouvoir, c'est la société
au contraire qui naît de lui ; il est le générateur,
le créateur, l'auteur ; il est supérieur à
elle..." Tome premier, p.491.
54 Nous utilisons aporie dans son sens fort (et non pas dans
la forme donnée par Aristote ) de difficulté logique
dont on ne peut pas sortir, ou de problème insoluble.
(Lalande)
55 Les paragraphes cités de La justice Politique de O.Höffe
se trouvent entre les pp. 147 et 165.
56 Nous utilisons ici le terme d'anomie au sens large d'absence
de normes. Forgé à l'époque moderne par
Jean-Marie Guyau dans son Esquisse d'une morale sans obligation
ni sanction (1884), anomie morale ou anomie religieuse (dans
L'irréligion de l'avenir, 1887) a un sens positif référé
à un futur dans lequel il n'y aura pas une loi universelle
ou dogmatique. Durkheim le reprend négativement et il
se généralise en sociologie après Parsons
et surtout Merton qui présente l'anomie comme le résultat
de la contradiction entre les fins culturels et les moyens légitimes
ou acceptables d'y parvenir.
57 Cette réponse est romantique et subjective, digne d'être
discutée au niveau de la philosophie individualiste, mais
extérieure à la dimension socio-politique que nous
avons choisie.
58 Article L'organizzazione, dans L'Agitazione d'Ancona, 4 juin
1897. (Cité par Luigi Fabbri in Malatesta. Ed. Americalee,
Buenos Aires, 1945. pp. 313-314.)
59 L'Egalité, de Genève, 1869. In : Bakounine,
Le socialisme libertaire. Ed. Denöel, Paris, 1973. (Textes
établis par Fernand Rude). p.127
60 Ibid., p.133
61 L'empire knouto-germanique et la révolution sociale
-1870/1871-. Oeuvres Complètes de Bakounine. Ed. du Champ
Libre, Paris, 1982. Vol.VIII
62 Ibid., p. 173
63 Ibid., p. 174.
64 Bakounine caractérise le moment de la rébellion
de négatif. Sans doute en rapport avec une vieille idée
de la gauche hégelienne que Bakounine développe
dans un article de 1842 (La réaction en Allemagne) accordant
une prépondérance fondamentale au négatif.
Jean Barrué dit que, pour Bakounine "le rationnel
que, seul, porte en lui l'élément négatif,
créera le réel". C'est le vrai sens de la
phrase si souvent citée et aussi mal comprise : "La
volupté de détruire est en même temps une
volupté créatrice", avec laquelle se termine
cet article.
65 Bakounine : Oeuvres Complètes. Vol. VIII, p.174
66 Simmel, Georg : Comment les formes sociales se maintiennent
. In Sociologie et épistémologie. P.U.F., Paris,
1981. p.177
67 Cf. Descombes, Vincent : Les institutions du sens. Ed. de
Minuit, Paris, 1996, pp. 122-127. Il s'agit d'une oeuvre philosophique
baucoup plus élaborée que ce que nous insinuons
ici, mais ces fragments nous suffisent dans les limites de cet
article.
68 Situation propre à l'ordre symbolique qui introduit
la rupture du présent absolu de la nature avec la distinction
du passé et du futur.
69 Dans De Cive Hobbes distingue le contrat et le pacte. Un contrat
est "l'action de deux, ou de plusieurs personnes, qui transigent
mutuellement de leurs droits". Le pacte signifie une promesse
pour le futur et il exige une confiance réciproque. Le
contrat est une transaction qui peut s'effectuer dans l'état
de nature, mais les pactes qui se font dans un contrat nécessitent
de "la société civile où il y a des
personnes qui peuvent contraindre les réfractaires."
Ed. Sirey, Paris, 1981, pp. 95-96.
70 Voir dikê et aidôs dans le mythe de Protagoras
déjà cité. "L'épée d'Héctor"
dans Gernet, Louis : Droit et institutions en Grèce antique.
Flammarion, Paris, 1982. p. 35. La critique de l'interprétation
de Levi-Strauss de l'Essai sur le don, dans Les institutions
du sens (op.cit.) de Vincent Descombes.
71 De Cive. Op. cit., p.103. Dans le Léviathan, chap.XV,
c'est la troisième loi de la nature : "que les hommes
s'acquittent de leurs conventions, une fois qu'ils les ont passées."
Ed. Sirey, Paris, 1971. p.143.
72 De Cive, p.122.
73 Ibid., p. 253. Nous avons utilisé le terme obligation
dans son sens étymologique d'origine latine : ligare,-atus
"lier", lien. Dans le texte anglais apparaît
sous la plume de Hobbes, dans le même sens, "to bind".
74 Pour des raisons que nous exposerons plus loin nous parlons
de sujet de l'action et non pas d'individu.
75 Pascal, Blaise : Pensées. V. La justice et la raison
des effets. (La phrase se poursuit en justifiant l'union de la
force et de la justice.) Ed. Bonnot, Paris, 1982. p.126
76 La Boétie, Etienne de : Le discours de la servitude
volontaire. Payot, Paris, 1976.
77 "Ce qui est ici désigné, c'est bien ce
moment historique de la naissance de l'Histoire, cette rupture
fatale qui n'aurait jamais dû se produire, cet irrationnel
événement que nous autres modernes nommons de manière
semblable la naissance de l'Etat." écrit Pierre Clastres
commentant le Contr'Un. Ibid. , p.231.
78 Weber, Max : Economia y sociedad. II. Fondo de cultura economica,
Mexico, 1944. p. 661.
79 Ibid., p. 662
80 Leroi-Gourhan, André : Technique et société
chez l'animal et chez l'homme. In, Le fil du temps. Ethnologie
et préhistoire. Fayard, Paris, 1983.
81 Gauchet, Marcel : Le désenchantement du monde. Gallimard,
Paris, 1985. p. 15
82 Testar, Alain : Les chasseurs-cueilleurs ou l'origine des
inégalités. Société d'ethnographie,
Paris, 1982. p.211
83 "...il n'y a pas lieu de penser l'anncienne société
de chasse-cueillette comme un paradis perdu où tout est
idéal : la redistribution comporte certains aspects inégalitaires,
certains privilèges moraux et matériels, ceux des
hommes par rapport aux femmes ou des vieux par rapport aux jeunes.
En bref, la dépossession du producteur est un phénomène
éminemment contradictoire et instable : probablement déjà
présent dans les sociétés paléolithiques,
il se prête aisément à une manipulation destinée
à consolider des inégalités naissantes,
débouchant ainsi sur un changement total de sa signification."
Ibid., p. 212
Sur l'important antécedent de la division hiérarchique
homme/femme voir mon texte : El cuerpo, la norma y la efraccion.
Anexo : Una retorica de la imagen en el paleolitico superior.
Revista de Psicoanalisis (Asociacion Psicoanalitica Argentina).
Internacional N° 4, Buenos Aires, 1995. (Version française
in Revue de Médecine Psychosomatique. N° 36, 1993.)
84 Confisquer est utilisé dans son sens général
de priver quelqu'un de quelque chose. Priver l'autre au profit
de soi-même. Accaparer.
85 Op. cit. ,p. 190
86 Quidditas, du latin scholastique signifie, ou désigne,
"ce qui fait que une chose est ce qu'elle est". Nous
l'utilisons pour éviter les connotations philosophiques
du terme essence.
87 Thèses sur la philosophie de l'histoire . Et il ajoute
: "Tous ceux qui jusqu'ici ont remporté la victoire
participent à ce cortège triomphal où les
maîtres d'aujourd'hui marchent sur les corps des vaincus
d'aujourd'hui. A ce cortège triomphal, comme ce fut toujours
l'usage, appartient aussi le butin".
88 Voir mon travail : L'Etat comme paradigme du pouvoir . Op.
cit. , pp.36-37-38.
89 Léviathan. Op. cit., pp. 177-178.
90 De Cive. Op. cit. , pp. 145-146-147.
91 Les doctrines traditionnelles du contrat servent à
fonder le devoir d'obéissance même si elles sont
présentées toujours en défense de la justice
et de la liberté. Rawls, qui essaie d'actualiser la théorie
du contrat pour définir "la justice de la structure
de base de la société", doit imaginer une
situation originelle dans laquelle un accord est formulé
sur les principes d'équité et de justice valables
pour la structure de base de la société. "Ce
sont les principes mêmes que des personnes libres et rationnelles,
désireuses de favoriser leurs propres intérêts,
et placées dans une position initiale d'égalité,
accepteraient et qui, selon elles, définiraient les termes
fondamentaux de leur association. Ces principes doivent servir
de règle pour tous les accords ultérieurs ; ...
Par conséquent nous devons imaginer que ceux qui s'engagent
dans la coopération sociale choisissent ensemble, par
un seul acte collectif (...) une fois pour toutes, ce qui en
son sein doit être tenu pour juste et pour injuste. Le
choix que des êtres rationnels feraient dans cette situation
hypothétique d'égale liberté, détermine
les principes de la justice" (pp.37-38). La conclusion sur
l'obéissance nous pouvons la lire dans 53. Le devoir d'obéir
à une loi injuste : "notre devoir naturel de soutenir
des institutions justes nous oblige à obéir à
des lois et des programmes injustes ou du moins, à ne
pas nous y opposer par des moyens illégaux tant qu'ils
ne dépassent pas un certain degré d'injustice".
(p. 395). Rawls, John : Théorie de la justice. Seuil,
Paris, 1987. ( Et quel est le degré intolérable?
Quel est le niveau de tolérance qui nous est éxigé?)
Sur l'idée du contrat entre personnes libres et égales
voir la critique de Bakounine aux "doctrinaires libéraux"
dans Dieu et l'Etat.
Une autre précision : Rawls nomme dans la filiation contractualiste
Locke, Rousseau et Kant et il exclut Hobbes. Par contre nous
citons abondamment Hobbes qui est le philosophe du pouvoir politique
qui ne se donne pas la peine de voiler pudiquement la domination.
92 Le problème de l'obéissance ou de la soumission
à l'autorité, exige une théorie psychologique
de la socialisation. Nous dirons seulement que Freud aussi imagine
(Totem et Tabou) à l'origine de l'humanité une
sorte de pacte social qui instaure l'interdit de l'inceste. Le
père primordial assassiné est restauré dans
le système patriarchal par la culpabilité inconsciente
et la soumission aux exigences de l'autorité, héritière
des prohibitions oedipiennes (conscience morale, Surmoi). L'autorité
hiérarchiquement située dans le système
institutionnel a sa contrepartie "interiorisée"
dans le système inconscient du psychisme humain.
93 Hume, David : Du contrat primitif. (1752). Hume est l'un des
critiques de l'idée de "contrat" comme légitimation
du pouvoir politique in Cahiers pour l'analyse n°6. Cercle
d'épistémologie de l'E.N.S., Paris, p.85
94 Finley, Moses I. : L'invention de la politique. Op. cit. ,
p.178
95 Finley signale à juste titre que la peur contribue
à expliquer l'obéissance mais pas l'obligation
politique, qui ne se justifie que idéologiquement. (Ibid.,
p. 193)
96 Op. cit. , p. 253.
97 Léviathan . Op. cit. , pp.223-224 . Remarquons la précision
de cette métaphore hobbessienne qui fait que les lois,
chaînes artificielles, vont des lèvres de celui
qui commande à l'oreille de celui qui obéit. Si
étymologiquement obligation renvoie à lien, à
lier physique ou moralement (lien qui peut être symétrique
ou réciproque, entre égaux), obéissance
renvoie à ouïr, famille du verbe latin audire. Oboedire
"mettre son oreille pour écouter quelqu'un",
"suivre ses conseils", "obéir" (relation
asymétrique).
98 "...dans aucune République ne se manifeste une
lourde incommodité, si ce n'est celle qui procède
de la désobéissance des sujets...". Ibid.,
p. 218
99 Au Moyen Age, la doctrine hiérocratique de l'Eglise
contribuera à renforcer ce paradigme. La sacralité,
dès lors, restera attachée à la construction
de l'Etat moderne et l'hétéronomie restera comme
la conséquence de l'extériorité du pouvoir
politique en rapport avec la société. Voir Ullmann,
Walter : Il pensiero politico del Medioevo. Laterza, Roma-Vari,
1984. Et mon article : L'Etat comme paradigme du pouvoir. Op.
cit. Voir aussi l'importance de la religion chez les inventeurs
de "la raison d'Etat" (Botero : "La religion,
en gouvernements, est de si grande force que, sans elle, tout
autre fondement de l'Etat vacille et n'est assuré."
In, Della Ragion di Stato, 1589). In Raison et déraison
d'Etat. Op. cit. , p. 101 et suivantes.
100 Pascal, Blaise : Op. cit., pp. 124-125
101 L'eschatologie est une doctrine concernant "les Derniers
Jours"ou "l'Etat final du monde". Le millénarisme
en est une variante.
102 Ce problème était déjà posé
à l'origine de la démocratie; souvenous-nous de
l'opinion de Trasymaque ou d'Alcibiade contre Périclès.
103 La souveraineté, surtout à partir de Bodin
(XVIème siècle) , est pensée dans le cadre
de l'Etat ; c'est ainsi qu'elle a été définie
comme la prerogative du commandement ou de l'autorité
suprême, summa potestas, summum imperium. La démocratie
place l'autorité suprême dans le peuple : le peuple
est souverain. Ou dans la Nation. Cette alternative dépend
de la théorie du droit. "La théorie du droit,
à partir du Moyen Age, s'organise essentiellement autour
du problème de la souveraineté et a la fonction
de fixer la légitimité du pouvoir. Dire que la
souveraineté est le problème central du droit dans
les sociétés occidentales, cela veut dire que le
discours et la technique du droit ont essentiellement eu la fonction
de dissoudre à l'intérieur du pouvoir le fait historique
de la domination et de faire apparaître à sa place
les droits légitimes de la souveraineté et l'obligation
légale d'obéissance." Foucault, Michel : Genealogia
del derecho. Ed. Altamira-Nordan, Buenos Aires-Montevideo, 1992.
p. 25
104 Le holisme est la position anti réductionniste selon
laquelle on ne peut pas connaître la partie sans connaître
le tout. Pour le holisme epistémologique aucun énoncé
isolé de son contexte sémantique n'a un sens univoque.
En sociologie l'opposition holisme-individualisme recouvre l'opposition
réalisme (Durkheim)-nominalisme (Tarde).
105 L'idée de Nation conçue comme un individu politique
fait partie d'une idéologie qui contient cette contradiction.
Voir Dumont, Louis : Homo hierarchicus. p.379. Note 6.
"Cette idéologie contient les deux idées :
d'une part l'individu est tout (la société n'est
donc rien qu'une collection d'individus), mais, d'autre part
la société que nous formons face aux autres, c'est
la nation, en ce sens que ce n'est pas le village, le clan, etc.,
et la réalité de la nation s'exprime dans le fait
qu'elle se présente, face aux autres nations, comme un
individu politique. L'Etat est donc présenté, dans
cette idéologie, tantôt comme un instrument de domination
que se disputent les individus réunis ou opposés
par leurs intérêts, tantôt comme un autre
nom de la société globale (c'est l'Etat national,
pôle d'une identité collective.)" Descombes,
Vincent : Op. cit. ,p. 125
106 Dumont, Louis : Essais sur l'individualisme. Seuil, Paris,
1983. p.113.
107 Ubiquiste est un terme peu usité qui demande quelques
précisions sur le sens qui nous lui accordons. L'ubiquité
est le caractère de "ce qui es par tout à
la fois", traditionnellement il désigne en théologie
un attribut de Dieu ; par extension il se dit (en français,
1808) de "la faculté de sembler être présent
en plusieurs lieux à la fois", grâce à
avoir le don de l'ubiquité (1842). Déjà
avant cet époque, ubiquiste, comme dérivé
savant du latin ubique, a désigné (1581) un docteur
en théologie n'appartenant à aucun collège
particulier. Ubiquiste s'est aussi employé (1839) pour
"personne qui a le don de l'ubiquité". En conséquence
avec ubiquiste nous voulons qualifier un sujet de l'action qui
s'actualise dans chaque situation particulière avec des
caractéristiques différents qui dépendent
des conditions de l'acte social.
108 Hypostase, hypostasier : créer une entité fictive,
une abstracion faussement considéré comme une réalité
; transformer une relation logique en une substance. (Lalande)
108 "Ainsi le sujet des institutions sociales n'est ni la
personne individuelle, ni une personne qui serait supérieure
aux individus (l'individu collectif, le "système"
pris pour une grosse substance). J'ai appelé "sujet
des institutions" l'agent dont l'action trouve dans l'institution
son modèle et sa règle." Descombes, V. :op.
cit. ,p. 307.
109 La Boétie, op. cit. , p. 196. |